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dimanche 7 juillet 2024
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Saint-Etienne Métropole : les biodéchets à l’épreuve du terrain

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Déjà investie sur le sujet depuis des années en sud Loire pour ce qui est du collectif, privé ou public, la coopérative Compost’Ond a obtenu le marché de traitement et valorisation des biodéchets dans Saint-Etienne Métropole à la fin de l’été dernier. La loi impose aux intercommunalités la mise en place de ce nouveau tri au 31 décembre. Ce qui amène Compost’Ond, dont le développement dépasse le territoire métropolitain, à y créer de nouvelles stations de valorisation. Pas évident, même si une solution vient d’être trouvée du côté de Saint-Jean-Bonnefonds.

Un des points d’apport volontaire de biodéchets déjà déployés par centaines dans l’Ondaine et Saint-Etienne. ©If Média / Xavier Alix

Ce round-là est apparemment gagné. Mais ce n’est sans doute que le premier. Avec une autre plateforme à ouvrir d’ici 2025, trois autres d’ici une dizaine d’années, il est en effet à parier que le combat du « terrain » reviendra, certes plus ou moins, mais fatalement gêner les plans de Compost’Ond. Ceux-ci répondent pourtant à l’intérêt général, celui des centaines de milliers de Ligériens soumis à une nouvelle obligation à propos des biodéchets. Des Ligériens habitant Saint-Etienne Métropole certes. Mais pas que puisque les activités de la coopérative s’adressent désormais à l’ensemble du département ainsi qu’à une partie des Altiligériens et des Ardéchois. Pour répondre aux nouveaux besoins, le premier obstacle, du moins foncier, semble avoir été franchi. A la suite d’un vote de son conseil municipal le 17 octobre, la commune de Saint-Jean-Bonnefonds accueillera bien sur son territoire dès 2024 la seconde station de compostage de la Société coopérative à intérêt collectif (SCIC) Compost’Ond.

C’est bien à cette dernière que Saint-Etienne Métropole a confié, sans surprise, le marché du tri et de la valorisation des biodéchets sur son territoire pour 4 ans mais aussi l’œuvre de pédagogie et de sensibilisation de la population – en partie déléguée à l’agence Voix publique -, de distribution de composteurs individuels et collectifs, en zone urbanisée ou non. Ainsi que le lavage, en partenariat avec Envie Loire, de ces « abris bac », dispositifs d’apport volontaire que l’on peut trouver depuis cet été dans les rues de Saint-Etienne, depuis mai dans l’Ondaine. Sans surprise parce que c’est déjà Compost’Ond qui avait été retenue pour mener des tests grandeur nature à Firminy et Saint-Etienne en 2022/23. Il faut dire qu’elle collecte déjà les biodéchets d’environ 250 structures privées ou publiques de la Loire de la Haute-Loire et même du Nord Ardèche : cantines scolaires et collectives, restaurants, Ehpad, entreprises, commerces alimentaires ou encore le GHT (Groupement hospitalier territorial) de la Loire, gros poisson dernièrement acquis. Les producteurs non ménagers de plus de 10 t/an de biodéchets sont en effet déjà soumis depuis des années à l’obligation de tri à la source. Un seuil passé à 5 t/an au 1er janvier 2023.

La nécessité de mailler le territoire en stations

Une grande partie des clients sont aussi des associés ou partenaires en soi de Compost’Ond. Comme l’ASSE, Aésio, l’Adapei, la Région, l’académie de Lyon ou encore la majorité des municipalités de plus de 5 000 habitants de la Loire. Rappelons que la loi impose à partir du 31 décembre 2023, le tri systématique des biodéchets à la source, y compris chez les particuliers. Aussi, elle réclame aux intercommunalités à qui revient la compétence déchets de leur fournir une solution active au 1er janvier. Plutôt que de devoir forcément se tourner vers les acteurs classiques de la gestion et du traitement des déchets comme Suez ou Véolia, le sud Loire a cette originalité – dans son ampleur, d’ordre national, dit même Compost’Ond – d’avoir à disposition cette solution développée sous forme de coopérative depuis maintenant 8 ans. Elle a été lancée par René Roux, ingénieur agronome, ex-directeur du centre de formation CFPPA de Montravel à Villars. L’idée est de mailler le territoire de la la Loire, y compris le nord désormais et l’est à la Haute-Loire avec des stations de réception/valorisation de tailles modestes, d’environ 2 500 à 5 000 m2 chacune. De quoi permettre une récupération de « gisements » localisée, dans un rayon d’une trentaine de kilomètres dans l’idéal.

La réussite dans son ensemble de projet, comme du tri en général, c’est une question de bonne volonté individuelle. Je me répète car il le faut : si les gens ne trient pas chez eux, personne ne le fera pour eux. 

François Driol, vice-président de Saint-Etienne Métropole en charge des déchets

De quoi rationaliser les tournées vis-à vis de leur bilan carbone : une immense implantation centralisatrice créerait une autre échelle de problèmes en termes de nuisances, en particulier les va-et-vient sur de longues distances des véhicules de chargement/ déchargement. Et donc, par-dessus tout, entrerait en paradoxe avec ce qui est un objectif de transition écologique. Selon le Modecom™ 2017 en effet, les déchets putrescibles – déchets alimentaires, produits alimentaires non consommés, déchets de jardin, autres putrescibles tels que les litières animales – représentent un tiers des « OMR » – les ordures ménagères résiduelles – soit 83 kg/hab/an. Sortir ce volume de nos poubelles, c’est réduire d’autant la masse envoyée en enfouissement, comme ce sera le cas en sud Loire pour encore des années, sinon en incinération. C’est donc réduire aussi le coût induit et enfin, obtenir de quoi fertiliser – la valorisation – nos sols agricoles mis à mal par l’exploitation humaine. Compost’Ond possède donc, pour l’heure, une station de 2 500 m2 au Chambon-Feugerolles. Elle est active depuis 2018 et a reçu, en 2022, plus de 1 000 t de déchets verts et encore plus de 1 000 autres de déchets alimentaires.

Une 2e station en 2024, une 3e en 2025

La coopérative dans le cadre de son développement est donc passée de 10 à 20 salariés en septembre en plus des trois co-gérants. Une partie de cet effectif ira travailler dès 2024 (l’aménagement de la station ne demande pas de bâtiments et donc de permis de construire) à Saint-Jean-Bonnefonds. Sur environ 35 000 t de biodéchets potentiels par an sur son territoire, « Saint-Etienne Métropole vise les 6 000 t récupérées en 2025 puis environ 10 000 en 2030, rappelle François Driol, maire d’Andrézieux-Bouthéon et vice-président de SEM en charge des déchets. La loi impose d’offrir des solutions à tous les administrés et ce sera le cas avec une mise en place progressive sur les premiers mois de 2024 selon les secteurs géographiques. » Saint-Etienne Métropole consacre d’ailleurs une page d’infos pratiques sur son site pour savoir à quel accompagnement matériel les administrés ont droit pour trier leurs biodéchets en fonction de son type de logement et de sa zone d’habitation au sein du territoire.  

L’implantation sur le terrain à l’entrée du quartier de la Calaminière, à Saint-Jean-Bonnefonds, originellement envisagée pour une seconde station a été abandonnée. ©If Média / JT

Cependant, l’élu pointe qu’« il faudra du temps pour que s’enracine systématiquement cette habitude. Des moyens aussi qu’ils soient collectifs ou pour que les gens puissent s’y mettre dans leurs immeubles, leurs lotissements. On en donne. Et oui, la collectivité peut commettre des erreurs comme, par exemple, ce manque de coordination constaté à Saint-Etienne lors des tests entre les compétences ramassage relevant de Métropole et celle propreté relevant de la Ville. Mais c’est bien l’intérêt des tests d’apprendre de nos erreurs autour de la mise en place d’un service nouveau. Après, la réussite dans son ensemble de projet, comme du tri en général, c’est une question de bonne volonté individuelle. Je me répète car il le faut : si les gens ne trient pas chez eux, personne ne le fera pour eux. » Le développement de Compost’Ond, en général, et le marché conclu à la fin de l’été avec la Métropole, en particulier, exigent en tout cas de nouvelles stations de valorisation après récupération. En attendant une 3e d’ici 2025 sur Saint-Etienne Métropole, l’urgence pour Compost’Ond était de trouver le lieu d’accueil d’une seconde, à l’est la ville centre, du côté de la couronne pour des raisons de couverture géographiques (accès au Gier notamment).

Une implantation voisinant Métrotech

Le dévolu jeté sur un terrain de Saint-Jean-Bonnefonds appartenant à la Ville de Sorbiers après la sollicitation de cette dernière (à la limite de cette commune et de La Talaudière) avait provoqué une levée de boucliers de riverains habitant à proximité. Comme nous le relations ici, ils s’étaient alarmés du trafic potentiel de véhicules et d’éventuelles odeurs que leur collectif assure avoir constaté en visitant la plateforme du Chambon-Feugerolles. Odeurs davantage fantasmées que réelles selon Compost’Ond : « Nous avions revu notre process au Chambon une première fois et on a eu très très rarement droit à des plaintes jusqu’à la venue de ce collectif, assure à If Lilian Roux, associé, entre autres, avec son père au sein de Compost’Ond. En juin, nous avons toutefois à nouveau revu ce process, les mélanges effectués. Malgré la chaleur estivale, les retours du voisinage que nous avons pris la peine d’interroger sont très bons. » Quoi qu’il en soit, au regard de l’urgence et de l’opposition, le site dit de la Calaminière a dû être abandonné au profit d’un autre. Mais toujours à Saint-Jean-Bonnefonds et appartenant à sa mairie qui va le louer à la coopérative.

La nouvelle plateforme occupera un terrain jouxtant une station d’épuration au sud de la D32 et de Métrotech. Capture d’une vue aérienne Google Map datant de 2023.

Il voisine immédiatement Métrotech, sur son flanc sud, jouxtant une petite station d’épuration. Un plan B, certes, mais qui a cependant l’avantage de disposer d’une desserte et d’une voirie déjà adaptées et de n’avoir aucune habitation à proximité. En revanche, il ne permettra pas la réalisation d’une station de 5 000 m2 comme espérée mais deux fois moindre. La physionomie du terrain exige des travaux d’une autre ampleur et donc dépenser davantage que le premier envisagé. Il s’agit aussi de se tenir à distance suffisante du ruisseau Le Ricolin en contre bas. L’investissement s’élèvera donc à un peu plus d’1 M€ pas si loin des 1,4 M€ prévus sur la Calaminière. Mais avec une seconde station deux fois moins grande que prévu, Compost’Ond sera-t-elle, du coup, en mesure de répondre aux objectifs de Saint-Etienne Métropole ? « Il faudra de toute façon une 3e station pour traiter les 6 000 tonnes fixées par la collectivité en 2025, rappelle à If Lilian Roux. Mais oui, nous serons en mesure d’accompagner l’amplification du tri dès le début d’année 2024. Dans la logique du circuit, il y a aussi la valorisation, ce qui part une fois maturé, la masse récupérée par nos partenaires. Nous en avons une vingtaine et travaillons actuellement à en obtenir bien davantage. » Un autre terrain tout aussi essentiel à investir.    

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